sb-button_point
Contact Info
Sidebar

LE JARDIN DU DIABLE

 

N'étaient ces lueurs étranges qui les éclairent et les fouillent au plus profond, il semblerait que ces jungles n'ont connu d'êtres humains.

Surpris par l'éclairage en son apparente immobilité, le chaos de la forêt détaille toute sa diversité, révélant la moindre fleur, la moindre feuille, une hiérarchie spontanée que l'homme n'a de cesse de dominer, inquiet de la puissance d'un monde qui l'a précédé et qu'il lui fallait asservir.

Hauts murs infranchissables vers lesquels tout conduit pourtant, la jungle offre dans son exubérance une fête végétale, une nature comme ivre de son autonomie. Il n'y manque qu'un fauve passant en silence, des yeux noirs dans le feuillage pour que surgisse aussitôt le souvenir du Douanier Rousseau ou celui des forêts d'encre nées du burin de Gustave Doré, celles où se perdait le Petit Poucet et notre enfance à sa suite.

Tout ici paraît témoigner d'une organisation savante, d'une irréprochable distribution, au point que l'on se prend à douter : paysages factices, nature domestiquée comme dans les serres tropicales ou décor pour quelque film d'aventure? Mais les lames des cactées, les trouées sans issue vers des ciels qui semblent de toiles tendues, les puits d'ombre aux mille dangers ne seraient-ils plutôt l'œuvre d'un jardinier machiavélique disposant telles les mailles d'un filet des pièges pour le regard.

Ces forêts-là tairont leurs secrets qu'Olivia Lavergne se gardera bien de trahir. Puisqu'elle seule s'y est rendue, qu'elle en est revenue, ce ne saurait être qu'au prix d'un pacte scellé avec elles, avec ces photographies jalonnant sa route comme autant de petits cailloux blancs.

Xavier Canonne

Directeur du Musée de la photographie à Charleroi.




SUBSCRIBE TO MY NEWSLETTER

Instagram Photos